« Nous avons voulu un spectacle simple, efficace fort en émotions, auquel puissent être associés tous ceux dont les noms sont gravés dans la pierre du monument aux morts de chaque lieu de présentation, qu'ils soient 20 ou qu'ils soient 100.
Nous avons voulu faire entendre le souffle de l'humain plutôt que le souffle du soldat en utilisant des textes extraits de carnets de guerre (notamment ceux de Louis Barthas) et des chansons d'époque ou en référence avec l'époque (Craonne bien sûr, La Butte rouge aussi, mais aussi toutes celles dont les paroles furent réécrites en fonction des circonstances comme Sous les ponts de Paris devenue Dans les tranchées de Gigny, ou ma Tonkinoise devenue Ma mimi ma mitrailleuse, ou encore Titine oh ma Titine, Flora de Bruant, Le temps des cerises... aussi Tu n'en reviendras pas d'Aragon ) »
Jean Bojko
Dans le cadre du centenaire et grâce à la générosité du Lion's club, le Centre Scolaire Notre Dame a permis aux élèves du lycée professionnel d'assister à une représentation théâtrale intitulée "T'as le salut du poilu"
De la "Grande guerre" les historiens retiennent les chiffres suivants : 10 millions de morts sur l'ensemble des fronts, 4800 soldats tués chaque jour du conflit, des dizaines de milliers de veuves, autant d'orphelins. A cela s'ajoutent les innombrables blessés, mutilés, et ceux que l'on appellera les gueules cassées. Cent ans... Nous avons bien tenté de détourner le regard... Ne pas se retourner... Foncer droit devant... Aller vite pour penser moins... Accélérer encore pour avoir l'excuse de ne pas se retourner... « Le degré de la vitesse est directement proportionnel à l'intensité de l'oubli » écrit Milan Kundera...
Et pourtant... Ils nous parlent... les poilus...
Eux, ne cessent de nous observer, attentivement , tranquillement, du fond des tiroirs, au détour d'une page, de l'étalage d'une brocante, du médaillon sépia plaqué sur une stèle au cimetière du village... Pétrifiés, sur leur stèle, dans chaque commune, ils sont là, toujours, présents d'être morts, et nous parlent un siècle, encore, plus tard...
Mais de quoi nous parlent-ils ?
Eh, bien ! Pas de la guerre, malgré le costume bleu horizon. Pas des souffrances endurées. Pas des obus qui labourent les corps. Pas des familles détruites. Pas des assauts à la baïonnette. Pas de la grosse Bertha et de la vie d'hommes devenus rats ou de rats devenus hommes. Pas des bras, des jambes, des yeux, des poumons, perdus dans les nuées de gaz moutarde. Non rien de tout cela, détrompons-nous. Ils ne sont pas dans la plainte, le gémissement. Ils ne cherchent pas la compassion. Ils nous parlent, oui... comme nous parle Louis Barthas , dans ses Carnets de guerre...
Ils nous disent à un siècle d'intervalle, ils nous rappellent cette capacité incroyable que nous avons, nous les humains, à vivre en paix en toute fraternité... Cette magnifique intelligence, que nous pouvons, si nous le voulons, utiliser pour nous créer les uns les autres, plutôt que pour nous détruire les uns les autres...
Voilà ce que cette pièce exprime au travers du témoignage poignant de ce poilu. Une expérience inédite pour nombre de jeunes... Une autre façon d'entrevoir cette période de notre histoire.